PLENIERE 1
- Transition agroécologique en zones pluviales en Algérie, par Bais Idir (agroéconomiste, membre du GRFI Filaha Innov’)
Quelle transition agro écologique (TAE) pour l’Algérie ?L’Agriculture algérienne et notamment les agrosystèmes pluviaux possèdent de nombreux avantages naturels quant aux dix éléments qui caractérisent l’agro écologie (diversité, synergie, résilience…) telle que définie par les experts de la FAO en 2018.Néanmoins, ces atouts ne peuvent être valorisés valablement et durablement que si un certain nombre de réformes structurelles fondamentales sont engagées préalablement, et ce aussi bien sur les volets foncier, financier, technique qu’organisationnel.
- Transition agroécologique dans l’agriculture algérienne. De Omar Bessaoud, agroéconomiste
« J’évoquerai la nécessaire transition technique fondée sur les principes et les pratiques de l’agroécologie moderne combinée, d’une part, à la réappropriation et/ou capitalisation des savoirs et savoir-faire de nos paysans, et d’autre part, à la décolonisation du savoir technique importé des pays tempérés du Nord de la Méditerranée. Dans ce cadre, je préconise de réhabiliter dans les formations des techniciens et agronomes, l’héritage de l’agronomie arabo-andalouse et berbère qui avait su mobiliser la petite hydraulique et des connaissances botaniques de haut niveau portant sur les plantes, de la sélection animale (ovin et équin), la diversification et l’adaptation des cultures à la qualité des sols, la fertilisation des champs (en partant du principe que « la plante nourrit la plante ») et le recours à des pratiques techniques qui ménageaient des sols légers et fragiles »
- L’agriculture oasienne solution à l’agriculture Saharienne : (Belgat Saci – pédologue) :
Deux modèles de développement de l’agriculture au Sahara s’affrontent.
Le premier modèle intensif, qualifié d’agriculture saharienne, il n’a aucune limite dans l’exploitation des ressources en eau et en sols. Dans ce système distingué abusivement de révolution verte, l’eau et le sol sont soumis à des dérégulations sans en tenir compte des équilibres d’un écosystème complexe et fragile d’autant que le climat est hyper aride, les sols peu évolués et très peu fertiles.
Cette exploitation effrénée, dopée, paradoxalement, par la crise financière commence par donner des signes d’épuisement irréversibles dans certaines zones (Adrar, ouéd Souf, les zibbans etc ).
Le deuxième modèle oasien écologiquement responsable qui considère que l’eau et les sols sont la colonne vertébrale des agrosystèmes oasiens et de ce fait, ils doivent être gérés et exploités rationnellement. Cet agrosystème ancestral a tous les attributs de la solution à l’agriculture saharienne écologiquement responsable.
État des lieux des écosystèmes oasiens et sahariens :
– Les agrosystèmes oasiens :
Les oasis d’Algérie représentent la plus grande superficie des oasis du Maghreb, soit environ 93000 hectares.
Toutes les formations alluvionnaires du grand sud, totalisant une superficie de 200.000 ha sont éligibles sur un plan agroclimatique à la phœniciculture.
Signes inquiétants de l’état des systèmes aquifères :
L’eau est puisée frénétiquement et sans aucune limite et contrôle du niveau piézométrique de l’aquifère septentrional.
Cette pratique est extrêmement dangereuse pour l’équilibre des écosystèmes.
– Contamination chimique des nappes
– Remontée critique des sels et salinisation secondaire (par endroit la salinité est supérieure à 4,5ms/cm.
– Artificialisation des sols, concassage des gypso-sols rendant les sols définitivement impropres à l’agriculture.
La réponse du système oasien à l’agriculture Saharienne :
– Economie d’eau ;
– Le palmier dattier culture principale malgré sa demande en eau 11000m3 d’eau/ha soit 1,5 fois la demande climatique du blé 750 m3, a l’avantage :
– de réduire considérablement l’évapotranspiration en comparaison avec les cultures intensives herbacées qui laissent le sol nu une partie de l’année,
– de partager l’eau avec d’autres cultures en strates,
– d’abriter et protéger d’autres cultures associées ou dérobées,
– Economie de sols :
– La palmeraie s’y prête aux cultures légumières et fourragères associées ou dérobées. A terme les oasis peuvent devenir le potager écologiquement responsable de l’Algérie.
– Développement du tourisme humainement responsable et solidaire agraire :
– En développant des gites et relais dans les palmeraies
– En réhabilitant les cultures et pratiques ancestrales autour des fougaras, des ghoutts et de la gattra.
– la culture du palmier dattier est à relancer, elle doit réoccuper toutes les oasis et les dayas à mettre en valeur.
– Classer la variété Deglett nour de Tolga en variété remarquable protégée, rechercher d’autres variétés liées à des terroirs spécifiques.
DEBATS
15 mars 2022
PLENIERE 2
- Rencontre Mathmoura II, impact et recommandations de Arfa Majid (association Torba)
Torba n’a cessé depuis qu’elle existe, de promouvoir l’agriculture durable ; les bonnes pratiques agricoles qui préservent la santé de l’homme agriculteur et consommateur, et de la nature mais aussi circuits de distribution courts et équitable pour toutes les parties intéressées.
Parmi les pratiques agricoles saines, il y en a une qui nous intéresse particulièrement, c’est l’utilisation des semences locales, car elle concentre plusieurs enjeux ; d’abord plus adaptées au contexte pédoclimatique de nos terroirs, elle se cultivent facilement et nécessitent peu d’apport et ont un meilleur rendement et offre à l’agriculteur une autonomie de semence car il peut les produire lui-même, de plus elles sont intégrées dans nos traditions culinaires, médicinales et font parties d’un patrimoine immatériel de savoir faire autour de la graine.
Cependant, cet héritage séculaire, cette ressource génétique est largement menacée par l’introduction massive de semences importées, le plus souvent hybrides qui offrent un meilleur rendement et qui sont de plus en plus utilisées par nos agriculteurs dans toutes les cultures, maraichères, arboricole et même céréalières.
Depuis Deux ans Torba a lancé une fête de la semence qui regroupe des agriculteurs qui disposent encore de cette ressource et qui sont disposés à la partager avec leurs pairs dans les pures traditions ancestrales. Cet événement vise à sensibiliser les agriculteurs à la préservation de cette ressource ; la deuxième édition a vu l’association du ministère de l’Agriculture par sa direction de l’agriculture biologique, ainsi que de tous les instituts techniques agricoles (ITAF, ITCMI, ITELV, INPV …) et a bénéficié d’un parrainage du ministre de l’Agriculture.
La visée de la deuxième Edition était de proposer une réflexion commune à cette problématique de préservation de cette ressource à tous les acteurs du secteurs et de poser les jalons d’une action commune et concertée et nous vous livrons ici les résultats de ces concertations des recommandations issus de cette rencontre .
DEBATS
PLENIERE 3
- Le monde rural montagneux en Algérie : contraintes, risques et enjeux de développement
Zoubir Sahli Agro économiste
En Algérie, le monde rural montagneux reste extrêmement marqué par son climat et son modeste niveau de développement. La production agricole y est fortement limitée par les faibles disponibilités en sol et en eau. On a à faire ici à un monde rural caractérisé par une série de risques, aussi bien climatiques que structurels, un milieu abritant le plus souvent des écosystèmes fragiles et perturbés et une population en voie d’appauvrissement, malgré l’existence de quelques zones et communes attractives sur le plan économique. L’espace agricole proprement dit y demeure assez restreint et très localisé : les contraintes climatiques et les pratiques des hommes ont fait que les surfaces réservées à l’agriculture se sont peu à peu amoindries; le chômage y est par ailleurs quasi général et les possibilités de travail hors de l’agriculture restent faibles. L’objectif de développement rural durable reste donc souvent difficile à atteindre sans une démarche prudente, claire et cohérente.
Les résultats du diagnostic et des analyses récentes ont montré qu’il existait une situation économique et sociale des plus difficiles et de nombreux problèmes. On cite par exemple :
-Les risques et les contraintes liés à l’environnement écologique et aux potentialités physiques. Les plus grands risques concernent surtout l’évolution négative induite par le processus de déperdition des surfaces foncières et la gestion irrationnelle des ressources hydriques.
–Les contraintes liées à l’environnement des activités agricoles et rurales : Elles concernent toutes les chaines de valeurs et le long de toutes les filières de production, de transformation, de commercialisation, de distribution, de stockage et de transport des produits agricoles et des produits de l’artisanat rural.
-Les contraintes d’implantation et de généralisation d’activités industrielles, artisanales et touristiques, la faiblesse des équipements infrastructurels et les retards dans le domaine socioculturel.
– La faiblesse de l’environnement institutionnel local : Le processus de décentralisation n’est pas toujours évident en l’absence d’une dynamique locale effective.
-Les institutions spécifiques au développement rural et les identités propres aux zones rurales : Elles sont encore floues et peu actives sur le terrain. Les groupements sociaux arrivent par ailleurs difficilement à s’organiser, faute d’informations, de réseaux de communication et de soutien matériel.
Que faire ?
Il est nécessaire tout d’abord de prendre conscience que la montagne en Algérie est un vaste espace géographique et humain en crise. Il y a donc une démarche de communication de grande envergure à mener pour « vulgariser » cette crise auprès du grand public, et ce en vue d’enclencher éventuellement un vaste processus de solidarité. Par ailleurs, il est nécessaire de varier les approches et de diversifier les remèdes. La diversité géographique et la complexité des problèmes, des contraintes et des besoins incitent à mettre en place une démarche cohérente de développement équilibré et harmonieux. Ce monde rural particulier qui a certes déjà fait l’objet de quelques actions de développement et d’aménagement, notamment ces dernières années, n’a pas reçu les solutions les plus efficaces et les plus adaptées. Sa situation de crise n’a pas encore été suffisamment exposée et ses richesses naturelles et humaines n’ont pas encore fait l’objet d’une politique de développement local et durable.
Alger, Mars 2022
- Torba (Rahal) : 1er Bilan et perspectives de la réhabilitation des vergers incendiés
Les incendies des régions montagneuses du mois d’aout 2021 ont causé une catastrophe aussi bien sanitaire, écologique, économique que sociale, mais aussi un élan de solidarité national, dont nous avons été témoins privilégiés. En effet, notre association a été parmi les premières à lancer une campagne d’aide aux agriculteurs de montagne. Passé ce grand moment de solidarité, nous avons réfléchi à comment relancer l’agriculture durable dans les régions de montagne, et particulièrement l’agroécologie.
Notre équipe d’animateurs a commencé par animer des rencontres avec des acteurs locaux (associations, agriculteurs, subdivision agricole), permettant de s’engager dans une démarche de réhabilitation et réaménagement des parcelles incendiées, limiter l’érosion, créer des baissières et cuvettes, apprendre à tailler les fruitiers, reboiser selon les lignes de courbe, lutter biologiquement contre les maladies…
Pour intervenir avec plus d’efficacité, nos prochaines actions se tourneront vers des producteurs d’olive, pour les inviter à respecter les bonnes pratiques, à commencer par la période de récolte, le mode de récolte, le temps de trituration, la taille des arbres, la lutte biologique, sans oublier le recyclage du grignon/margine et l’irrigation en temps sec, permettant d’avoir une production annuelle de qualité et à moindre coût.